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.La respiration dans les films de Kurosawa ne consiste pas seulement dans les alternances entre scènes épiques et intimes, intensité et répit, travelling et gros plan, séquences réalistes et irréalistes, mais plus encore dans la manière dont on s’élève d’une situation réelle aux données nécessairement irréelles d’une question qui hante la situation16.Troisième cas : il faut évidemment que le personnage s’imprègne de toutes les données.Mais, puisqu’elle renvoie à une question plutôt qu’à une situation, cette imprégnation-respiration diffère profondément de celle de l’Actors Studio.Au lieu de s’imprégner d’une situation, pour produire une réponse qui n’est qu’une action explosive, il faut s’imprégner d’une question, pour produire une action qui soit vraiment une réponse pensée.Le signe de l’empreinte, dès lors, connaît un développement sans précédent.Dans « Kagemusha », le double doit s’imprégner de tout ce qui entourait le maître, il doit lui-même devenir empreinte et traverser les situations diverses (les femmes, le petit enfant et surtout le cheval).On dira que des films occidentaux ont pris le même thème.Mais, cette fois, ce dont le double doit s’imprégner, c’est de toutes les données de la question que seul le maître connaît, « rapide comme le vent, silencieux comme la forêt, terrible comme le feu, immobile comme la montagne ».Ce n’est pas une description du maître, c’est l’énigme dont il possède et emporte la réponse.Loin de faciliter l’imitation, c’est cela qui la rend surhumaine ou lui assure une portée cosmique.Il semble que l’on se heurte ici à une nouvelle limite : celui qui s’imprègne de toutes les données ne sera qu’un double, une ombre asservie au maître, au Monde.« Dersou Ouzala », le maître des empreintes forestières, glisse lui-même à l’état d’ombre quand sa vue baisse, et qu’il ne peut plus entendre la question sublime que la forêt pose aux hommes.Il mourra, bien qu’on lui ait aménagé une « situation » confortable.Et « Les Sept Samouraï » : s’ils se renseignent si longuement sur la situation, s’ils ne s’imprègnent pas seulement des données physiques du village, mais des données psychologiques des habitants, c’est parce qu’il y a une question plus haute qui ne pourra se dégager que peu à peu de toutes les situations.Cette question n’est pas : peut-on défendre le village, mais : qu’est-ce qu’un samouraï, aujourd’hui, juste à ce moment de l’Histoire ? Et la réponse, qui viendra avec la question enfin atteinte, sera que les samouraï sont devenus des ombres qui n’ont plus de place ni chez les maîtres ni chez les pauvres (les paysans ont été les vrais vainqueurs).Mais dans ces morts-là, il y a quelque chose de pacifié qui laisse présager une réponse plus complète.En effet, un quatrième cas permet de récapituler l’ensemble.« Vivre » est un des plus beaux films de Kurosawa, qui pose la question : que faire, si l’on est un homme qui se sait condamné à ne plus vivre que quelques mois ? Mais est-ce la vraie question ? Tout dépend des données.Faut-il comprendre : que faire pour connaître enfin le plaisir ? Et l’homme, étonné, maladroit, fait la tournée des lieux de plaisir, bars et strip-tease.Est-ce cela, de vraies données pour une question ? N’est-ce pas plutôt une agitation qui la recouvre et la cache ? Éprouvant une forte affection pour une jeune fille, l’homme apprendra d’elle que la question n’est pas davantage celle d’un amour tardif.Elle cite son propre exemple, explique qu’elle fabrique en série des petits lapins mécaniques dont elle est heureuse de savoir qu’ils vont passer entre les mains d’enfants inconnus, qu’ils feront ainsi le tour de la ville.Et l’homme comprend : les données de la question « Que faire ? », ce sont celles d’une tâche utile à remplir.Il reprend donc son projet d’un parc public, et surmonte avant de mourir tous les obstacles qui s’y opposaient.Là encore, on pourra dire que Kurosawa nous livre un message humaniste assez plat.Mais le film est tout autre chose : la recherche obstinée de la question et de ses données, à travers les situations [ Pobierz całość w formacie PDF ]
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.La respiration dans les films de Kurosawa ne consiste pas seulement dans les alternances entre scènes épiques et intimes, intensité et répit, travelling et gros plan, séquences réalistes et irréalistes, mais plus encore dans la manière dont on s’élève d’une situation réelle aux données nécessairement irréelles d’une question qui hante la situation16.Troisième cas : il faut évidemment que le personnage s’imprègne de toutes les données.Mais, puisqu’elle renvoie à une question plutôt qu’à une situation, cette imprégnation-respiration diffère profondément de celle de l’Actors Studio.Au lieu de s’imprégner d’une situation, pour produire une réponse qui n’est qu’une action explosive, il faut s’imprégner d’une question, pour produire une action qui soit vraiment une réponse pensée.Le signe de l’empreinte, dès lors, connaît un développement sans précédent.Dans « Kagemusha », le double doit s’imprégner de tout ce qui entourait le maître, il doit lui-même devenir empreinte et traverser les situations diverses (les femmes, le petit enfant et surtout le cheval).On dira que des films occidentaux ont pris le même thème.Mais, cette fois, ce dont le double doit s’imprégner, c’est de toutes les données de la question que seul le maître connaît, « rapide comme le vent, silencieux comme la forêt, terrible comme le feu, immobile comme la montagne ».Ce n’est pas une description du maître, c’est l’énigme dont il possède et emporte la réponse.Loin de faciliter l’imitation, c’est cela qui la rend surhumaine ou lui assure une portée cosmique.Il semble que l’on se heurte ici à une nouvelle limite : celui qui s’imprègne de toutes les données ne sera qu’un double, une ombre asservie au maître, au Monde.« Dersou Ouzala », le maître des empreintes forestières, glisse lui-même à l’état d’ombre quand sa vue baisse, et qu’il ne peut plus entendre la question sublime que la forêt pose aux hommes.Il mourra, bien qu’on lui ait aménagé une « situation » confortable.Et « Les Sept Samouraï » : s’ils se renseignent si longuement sur la situation, s’ils ne s’imprègnent pas seulement des données physiques du village, mais des données psychologiques des habitants, c’est parce qu’il y a une question plus haute qui ne pourra se dégager que peu à peu de toutes les situations.Cette question n’est pas : peut-on défendre le village, mais : qu’est-ce qu’un samouraï, aujourd’hui, juste à ce moment de l’Histoire ? Et la réponse, qui viendra avec la question enfin atteinte, sera que les samouraï sont devenus des ombres qui n’ont plus de place ni chez les maîtres ni chez les pauvres (les paysans ont été les vrais vainqueurs).Mais dans ces morts-là, il y a quelque chose de pacifié qui laisse présager une réponse plus complète.En effet, un quatrième cas permet de récapituler l’ensemble.« Vivre » est un des plus beaux films de Kurosawa, qui pose la question : que faire, si l’on est un homme qui se sait condamné à ne plus vivre que quelques mois ? Mais est-ce la vraie question ? Tout dépend des données.Faut-il comprendre : que faire pour connaître enfin le plaisir ? Et l’homme, étonné, maladroit, fait la tournée des lieux de plaisir, bars et strip-tease.Est-ce cela, de vraies données pour une question ? N’est-ce pas plutôt une agitation qui la recouvre et la cache ? Éprouvant une forte affection pour une jeune fille, l’homme apprendra d’elle que la question n’est pas davantage celle d’un amour tardif.Elle cite son propre exemple, explique qu’elle fabrique en série des petits lapins mécaniques dont elle est heureuse de savoir qu’ils vont passer entre les mains d’enfants inconnus, qu’ils feront ainsi le tour de la ville.Et l’homme comprend : les données de la question « Que faire ? », ce sont celles d’une tâche utile à remplir.Il reprend donc son projet d’un parc public, et surmonte avant de mourir tous les obstacles qui s’y opposaient.Là encore, on pourra dire que Kurosawa nous livre un message humaniste assez plat.Mais le film est tout autre chose : la recherche obstinée de la question et de ses données, à travers les situations [ Pobierz całość w formacie PDF ]